Assemblée plénière – Lundi 14 mars 2022 – Intervention de Geneviève Augé relative au projet de maquette du plan stratégique national PAC 2023-2027

Assemblée plénière

Lundi 14 mars 2022

Intervention de Geneviève Augé relative au projet de maquette du plan stratégique national PAC 2023-2027

Monsieur le Président,

Chers collègues,

Le projet de nouvelle Politique Agricole Commune est déconnecté des enjeux écologiques et sociétaux actuels. Son adoption, si elle se fait en l’état, ne fera que poursuivre la fuite en avant d’un modèle agro-industriel à bout de souffle, sans aucune avancée en matière de protection de l’environnement, ni de prise en compte de l’urgence climatique. Ce projet tourne également le dos aux paysans, en faisant perdurer l’inégale répartition des aides : les 20% d’agriculteurs qui en ont le moins besoin pourront continuer à bénéficier des 80% de l’enveloppe. Et aucune ambition d’envergure n’apparaît quant à l’installation des jeunes et au nécessaire renouvellement des générations, alors que la moitié des agriculteurs partira à la retraite dans les 5 ans à venir.

Nous devons relancer les négociations de la PAC pour faire valoir avec force et courage nos spécificités régionales. A ce titre, la Confédération Paysanne Normandie vous a adressé une lettre ouverte, M. le Président, ainsi qu’à l’ensemble des élu-e-s de cette assemblée, pour demander l’activation de deux mesures complémentaires en matière d’agroforesterie. Il s’agit de la mesure d’aide à l’investissement 68.02 qui permet de soutenir l’animation et les travaux de plantations et de restauration des haies, ainsi que de la MAEC biodiversité 65.14 qui permet de soutenir leur gestion sylvicole. Ces mesures n’apparaissent plus parmi les interventions FEADER planifiées par les Régions.

Or, notre région est aujourd’hui leader en France sur le linéaire de haie. La haie est un marqueur normand fort et un élément incontournable de nos bocages dont le maintien répond de manière adaptée aux défis de protection de la biodiversité, de préservation des sols, de qualité de l’eau, du stockage carbone, et de lutte contre le réchauffement climatique. Plus que jamais, la haie doit trouver sa place dans nos politiques. En cela, la MAEC 65.14 répond particulièrement aux besoins des agriculteurs pour entretenir leurs haies et en améliorer la qualité environnementale. Ce besoin est reconnu par tous, alors que les agriculteurs sont contraints d’en assumer la charge sans en avoir les moyens. Cette mesure composerait un paiement pour service environnemental enfin pris en compte, à hauteur des exigences qui sont demandées. La Région Normandie doit exiger de l’Europe que ces deux mesures, nécessaires à un territoire comme le nôtre, soit réactivées.

Par ailleurs, nous devons tout mettre en œuvre pour permettre le renouvellement des générations. Pourtant, depuis 2016, vous avez abandonné les contrats de transmission des sièges d’exploitations agricoles mis en place par les régions Basse et Haute Normandie. Ce contrat de transmission avait pour mission de sauvegarder les entités agricoles autour des sièges d’exploitation, mutés en fermage, en installant des paysans ayant signés des contrats de parrainage. Le but était de ne pas gaspiller les aides publiques ayant servis à la modernisation des bâtiments et des mises aux normes. Hélas, cette politique a été écartée par votre majorité. Envisagez-vous de rétablir ce dispositif, qui peut être financés dans le cadre du FEADER ?

Enfin, les programmes activés devront être mis en œuvre avec cohérente, mais nous nourrissons quelques inquiétudes à ce sujet. La MAEC 70.29, qui concerne la protection des abeilles, est notamment présente dans la maquette soumise au vote aujourd’hui. Cela s’assortie d’une belle manière avec le programme de soutien aux races locales et aux variétés anciennes mis en place en 2018, et l’abeille noire de Normandie est concernée par ce programme. Pourtant, Monsieur le Président, l’an passé, vous avez demandé et revendiqué la réintroduction des néonicotinoïdes tueurs d’abeilles sur la betterave, et vous avez obtenu gain de cause, mettant ainsi en danger l’abeille noire. Les fonds alloués à la protection de l’environnement et de la biodiversité sont déjà trop maigres pour que l’on puisse se permettre de les gaspiller. Que comptez-vous faire à ce sujet ?

Il est aujourd’hui nécessaire de consolider les dimensions sociale et environnementale de notre agriculture si nous voulons assurer notre souveraineté alimentaire. Les temps tourmentés que nous traversons nous le crient chaque jour. Des erreurs ont été commises, et il faut les réparer.

Je vous remercie.