Assemblée plénière – Lundi 20 juin 2022 – Intervention et amendements de Geneviève Augé sur la nouvelle politique régionale de la forêt et du bois

Assemblée plénière

Lundi 20 juin 2022

Intervention et amendements de Geneviève Augé sur la nouvelle politique régionale de la forêt et du bois

Intervention :

Monsieur le Président,

Chers collègues,

Je reconnais des avancées dans cette nouvelle politique forêt/bois régionale. La présence de la brique biodiversité est appréciable, tout comme la volonté d’accompagner l’installation de scieries locales. Je déplore par contre la vision productiviste qui transparaît. Il semble qu’il soit oublié que la forêt et les arbres en général apportent de nombreux services écosystémiques qui devraient être reconnus, valorisés et soutenus.

J’espère ne rien apprendre à personne en rappelant que les forêts sont des puis de carbone et des réserves de biodiversité. A l’heure du dérèglement climatique et de la sixième extinction de masse, la gestion de nos forêts n’est pas un enjeu mineur. C’est une question de survie. Il me semble assez inconséquent, quand on prend la mesure des choses, de privilégier – et de loin – la valeur économique du bois face à sa fonction écologique.

Je ne dis pas qu’il ne faut pas produire de bois de chauffage ni de bois d’œuvre. Il y a une forte demande en bois, cette demande n’ira qu’en augmentant, et nous devrons nous donner les moyens d’y répondre, même en espérant que la sobriété trouve sa voie dans notre société. Mais il ne faut pas que cela se fasse au détriment des paysages, du climat et de la biodiversité, ou à crédit des générations futures. Nous devons penser notre gestion sylvicole à long terme et la guider vers un modèle durable.

En ce sens, je regrette l’absence de conditionnalité, une fois encore. C’est pourquoi je propose un amendement conditionnant l’éligibilité aux aides publiques à un engagement vers des méthodes assurant la protection des écosystèmes et de la vie du sol, ainsi qu’une viabilité à long terme des peuplement exploités. L’utilisation d’outils tels que l’Indice de biodiversité potentielle, le maintien d’ilots de sénescence ou de trames d’arbres habitats, l’encadrement des coupes rases, la gestion en futaie régulière ou encore la diversification des essences me paraissent nécessaires à une gestion durable.

Cette question est d’autant plus pressante à l’heure de l’emballement climatique. Les forêts sont mises à mal par les sécheresses à répétition et la hausse des températures. Il est donc nécessaire d’encourager la recherche sur l’adaptation de nos forêts face à cet avenir incertain, et il est d’autant plus urgent d’appliquer les solutions que nous connaissons déjà.

Je vous remercie.

Amendements :

Amendement n°26 déposé par Geneviève Augé, Rudy L’Orphelin et Laetitia Sanchez :

Modifier ainsi les annexes : 

I. – À l’annexe 2 « Normandie Forêt Investissements au sein des entreprises forestières », dans la partie « Critères d’éligibilité du projet », insérer les mots suivants :

« Pour bénéficier de ce dispositif, le demandeur s’engage à : 

  • Mettre en place un IBP (Indice de biodiversité potentielle) sur chacun de ses peuplements, et intégrer un objectif d’amélioration de cet indice sur la durée du document de gestion ;
  • Conserver des éléments favorables à la biodiversité forestière permettant le maintien d’un réseau de conservation composé d’îlots de vieillissement/sénescence et d’un réseau ou d’une trame d’arbres habitats ou morts sur pieds ;
  • Respecter un seuil strict de coupes rases de 4 hectares continus, tout dépassement de ce seuil étant alors soumis à autorisation, et de ne pratiquer une coupe rase que lorsque l’ensemble des peuplements limitrophes atteint à minima le stade « gaulis ». Les peuplements à un stade de dépérissement avancé ne sont pas concernés par ce seuil ;
  • Reconstituer le peuplement au plus tard 2 ans après une coupe rase, avec des peuplements mélangés comprenant au minimum 3 essences objectives ;
  • S’assurer que ses places de dépôt et les routes forestières ne nuisent pas à des milieux patrimoniaux tels que les zones humides, tourbières, landes à éricacées, coteaux, pierriers ou milieux aquatiques ;
  • Intégrer à son document de gestion des actions permettant qu’à terme au moins 50% des peuplements du demandeur s’orientent vers une gestion de ses peuplements en futaie irrégulière.»

II. – À l’annexe 3 « Normandie Forêt Conseils », dans la partie « Caractéristiques de l’aide et critères d’éligibilité », insérer les mots suivants :

« Pour bénéficier de ce dispositif, le demandeur s’engage à : 

  • Mettre en place un IBP (Indice de biodiversité potentielle) sur chacun de ses peuplements, et intégrer un objectif d’amélioration de cet indice sur la durée du document de gestion ;
  • Conserver des éléments favorables à la biodiversité forestière permettant le maintien d’un réseau de conservation composé d’îlots de vieillissement/sénescence et d’un réseau ou d’une trame d’arbres habitats ou morts sur pieds ;
  • Respecter un seuil strict de coupes rases de 4 hectares continus, tout dépassement de ce seuil étant alors soumis à autorisation, et de ne pratiquer une coupe rase que lorsque l’ensemble des peuplements limitrophes atteint à minima le stade « gaulis ». Les peuplements à un stade de dépérissement avancé ne sont pas concernés par ce seuil ;
  • Reconstituer le peuplement au plus tard 2 ans après une coupe rase, avec des peuplements mélangés comprenant au minimum 3 essences objectives ;
  • S’assurer que ses places de dépôt et les routes forestières ne nuisent pas à des milieux patrimoniaux tels que les zones humides, tourbières, landes à éricacées, coteaux, pierriers ou milieux aquatiques ;
  • Intégrer à son document de gestion des actions permettant qu’à terme au moins 50% des peuplements du demandeur s’orientent vers une gestion de ses peuplements en futaie irrégulière.»

Exposé sommaire :

Cet amendement vise à conditionner les subventions régionales aux propriétaires forestiers au respect de certains principes de gestion durable et de respect des écosystèmes forestiers

Ces engagements des propriétaires sont absolument nécessaires pour assurer le fonctionnement durable des forêts, aussi bien du point de vue environnemental qu’économique. La préservation de la diversité biologique et le maintien d’un fonctionnement naturel à minima sont en effet indispensables à la résilience des forêts aux pressions anthropiques en général et au changement climatique en particulier. 

Depuis 2008, les capacités de séquestration du carbone des forêts françaises ont diminué et cette tendance devrait se poursuivre dans les années à venir. Principales causes : la surexploitation à des fins économiques de court terme et les impacts du changement climatique. Victimes de politiques focalisées sur l’exploitation plutôt que sur la préservation et le renforcement des puits de carbone, nos forêts manquent de résilience en raison de la faible diversité écosystémique, qui a également pour effet de limiter les capacités de séquestration du carbone. 

Amendement n°27 déposé par Geneviève Augé, Rudy L’Orphelin et Laetitia Sanchez :

À l’annexe 6 « Normandie Entreprises Industries Volet Agro – Industries Agro et Industries de Valorisation du bois », dans la partie « Projets, dépenses éligibles/dépenses inéligibles » :

1.- Retirer les mots « neufs » dans la liste des dépenses éligibles ;

2.- Dans la liste des dépenses inéligibles, retirer les mots :

« 

– l’auto-construction ;

– les matériels et équipements d’occasion, »

Exposé sommaire :

Cet amendement vise à supprimer l’obligation d’investissement dans des matériels et équipements neufs et à rendre éligibles au dispositif les achats permettant l’auto-construction.

Les enjeux environnementaux nous invitent à la sobriété et devraient nous encourager au réemploi. Par ailleurs, la crise des matériaux, conséquence de la pandémie et de la guerre en Ukraine, rend difficile et couteux, voire impossible, l’approvisionnement neuf de certaines matières et de certains produits.

Rendre éligible les achats destinés à l’auto-construction va également dans ce sens. De plus, elle est souvent pratiquée par des petits exploitants disposant de peu de moyens pour assurer leur activité. Ne pas restreindre le financement de ces petites exploitations favorise la création d’emplois et participe activement à la souveraineté alimentaire de nos territoires.