Assemblée plénière Région Normandie – Lundi 26 juin 2023 – Intervention de Rudy L’Orphelin et amendements au Contrat de Plan Etat-Région 2021-2027

Assemblée plénière Région Normandie

Lundi 26 juin 2023

Intervention de Rudy L’Orphelin et amendements au Contrat de Plan Etat-Région 2021-2027

Monsieur le président, chers collègues,

Cette délibération relative à l’adoption du CPER 2021-2027 n’apporte guère de surprise eu égard au protocole d’accord qui avait été présenté à notre assemblée en octobre 2022.

Les enjeux de l’époque, ceux qui tiennent à lutte contre le dérèglement climatique et à l’adaptation, au mieux vivre et à la protection de la biodiversité sont malheureusement insuffisamment pris en charge.  

Nos territoires normands vivent pourtant comme ailleurs au rythme des sécheresses, des canicules et autres phénomènes extrêmes ; les Normand.e.s souffrent eux aussi des factures énergétiques qui explosent dans un contexte où la tension sur les ressources est toujours plus forte.

A en croire les alertes répétées du GIEC, ce n’est pourtant pas en 2050 mais dans cette décennie qu’il nous faut radicalement réorienter les investissements vers la sobriété énergétique en isolant massivement les bâtiments et logements, vers les énergies renouvelables en accompagnant les filières, vers la mobilité durable en proposant des alternatives crédibles à la voiture particulière et au tout camion, etc.

Les choix faits aujourd’hui dans le cadre du CPER 2021-2027 sont loin de se limiter à cette période, ils nous engagent pour des décennies et conditionnent la trajectoire climatique de notre région.

Alors oui, la transition écologique fait bien partie des priorités affichées de ce nouveau contrat de plan. Mais à regarder les chiffres de près rien n’est malheureusement plus éloigné de la réalité. Le CPER aurait dû être l’occasion d’acter un accord ambitieux Etat-Région en matière de transition, tel n’est malheureusement pas le cas. Il y a donc là une grave occasion manquée.  

Sur le volet mobilité, les orientations ne tiennent aucune aucunement compte des nouvelles réalités climatiques et sociales. Alors que le secteur des transports reste le premier poste d’émissions de gaz à effet de serre, la stratégie devrait être au développement des trains du quotidien, du fret et de toutes les alternatives à la voiture particulière.

Mais ici, il s’agit ni plus ni moins que de poursuivre le financement des infrastructures routières inscrites dans le précédent CPER, soit la promesse de plus de trafic, plus de pollution et plus d’émissions de gaz à effet de serre. Rien que pour les années 2021-2022, c’est en effet encore la route qui domine (234 millions dont 119 millions de crédits région) et tout ceci au détriment du volet ferroviaire (157 millions €).

Le choix est malheureusement très clair et nous appelons à ce que la négociation ouverte avec l’Etat depuis quelques semaines sur le volet infrastructures et mobilité pour les années 2023 et suivantes soit l’occasion d’inverser la tendance.

Nous soutenons bien entendu les crédits fléchés vers la réhabilitation des bâtiments publics et des copropriétés. Mais là encore, ces montants (15 + 10 millions € côté Région) sont notoirement insuffisants pour faire face à l’impérieux défi de la réhabilitation énergétique du patrimoine bâti normand, condition sine qua non d’une transition énergétique réussie.

S’agissant du développement des énergies renouvelables, l’ensemble est en baisse par rapport à la première mouture (- 13 millions d’euros de crédits ADEME). De son côté, la Région abondera les crédits Etat à hauteur de 5 millions d’euros. C’est dérisoire. C’est pourtant maintenant qu’il faut s’engager dans une production massive d’énergies renouvelables alors que notre région accuse un retard considérable :  Du côté de l’éolien terrestre et malgré un potentiel élevé, la Région Normandie est quasi-lanterne rouge avec seulement 1 GW de puissance installée sur le territoire. Quant au solaire photovoltaïque, la Normandie c’est tout juste 2% de la puissance installée à l’échelle nationale et les chiffres de l’année 2022 sont criants : la Normandie c’est 2 fois moins de puissance installée que les Hauts de France, 4 fois moins que la Bretagne et 5 fois moins que les Pays de la Loire. 

Peut-on être surpris de ces choix faits à l’occasion du CPER ? Vous avez fait du nucléaire l’alpha et l’oméga de votre stratégie énergétique régionale et vous menez une croisade à l’encontre du solaire et de l’éolien (y compris sur l’éolien offshore pour lequel vous multipliez les réserves). Mais là où les EPR seront au mieux mis en service en 2035/2040, les énergies renouvelables sont elles immédiatement disponibles et compétitives. Agir dans la décennie, c’est donc nécessairement y avoir recours ; tous les scénarios prospectifs (ADEME, RTE, Négawatt, etc.) y compris les plus nucléarisés – le disent. Chercher à freiner le développement du solaire et de l’éolien est donc tout à fait irresponsable et relève de l’aveuglement idéologique. 

Enfin, l’enveloppe de 15 m€ sur 6 ans (+ 600 000 euros de crédits ADEME) pour répondre à l’enjeu d’adaptation au changement climatique est, nous l’avons déjà dit, bien trop faible au regard de l’ampleur des changements et des dérèglements auxquels il nous faut faire face dès à présent. (L’emploi du futur dans le rapport est de ce point de vue tout à fait éclairant).

Rappelons que la Normandie c’est 640 km de côtes ! Ce seul chiffre dit tout des efforts immenses à déployer pour organiser l’adaptation (jusqu’à la relocalisation de l’habitat et des activités) du littoral normand. Et nous ne parlons ici que du littoral là où l’adaptation au changement climatique interroge tous les secteurs de la vie en société (habitat, industrie, agriculture, aménagements urbains etc.).

Dernier point sur la méthode. La délibération précise qu’il est donné mandat à la commission permanente pour la suite des opérations. Quid du volet infrastructures et mobilité ? Confirmez-vous qu’il fera bien l’objet d’une contractualisation spécifique et à ce titre qu’il sera présenté en Assemblée Plénière ?

Je vous remercie.

AP 23-ADT-06-06-9

RÉGION NORMANDIE

Conseil Régional

Réunion du 26 juin 2023

Groupe Normandie Écologie

Amendement n°10 déposé par Laetitia Sanchez et Rudy L’Orphelin :

  1. – Augmenter les crédits Région du sous-volet 3-2 « Efficacité énergétique et développement des énergies renouvelables » du Contrat de plan État-Région 2021-2027 pour la Normandie de 34 372 000€
  2. – Cette augmentation entraînera un ajustement des crédits pluriannuels lors du vote du Budget primitif 2024

Exposé sommaire :

Cet amendement vise à augmenter les crédits régionaux destinés au financement des énergies renouvelables via le CPER 2021-2027 pour atteindre un niveau équivalent à ceux engagés par l’État via l’ADEME.

Le potentiel de développement des énergies renouvelables à l’échelle de la région est explicitement mentionné dans le CPER. Bois-énergie, méthanisation agricole et industrielle, éolien terrestre, éolien offshore, hydrolien et photovoltaïque ; les gisements disponibles sont importants et variés.

Ce constat ne débouche cependant sur aucune ambition d’accélération de leur déploiement. En particulier, en refusant de soutenir les projets d’éolien terrestre et offshore et de solaire photovoltaïque hors autoconsommation, la Région se prive des deux leviers les plus importants pour produire de l’électricité bas-carbone bon marché et réduire rapidement notre dépendance aux énergies fossiles. 

Si le solaire photovoltaïque tend à se développer, sa progression reste insuffisante au regard des objectifs fixés au niveau national, qui sont amenés à augmenter avec la prochaine Programmation pluriannuelle de l’énergie. Le potentiel de développement de l’éolien offshore reste important et, là encore, de nouveaux investissements devront être réalisés. Quant à l’éolien terrestre, la Normandie occupe seulement la 10ème place des régions métropolitaines en termes de puissance installée. 

Les crédits affectés au développement des énergies renouvelables dans le CPER sont finalement largement insuffisants pour compenser le retard de la Normandie en matière de production d’énergie d’origine renouvelable. Ces crédits de la Région et de l’Etat dans le cadre du Plan de Relance sont même inférieurs à ceux présentés dans le protocole d’accord en octobre dernier. Nous proposons donc d’augmenter les financements régionaux destinés aux énergies renouvelables à hauteur de ceux de l’État et de ne pas exclure l’éolien terrestre et offshore des financements dans le cadre du CPER.

AP 23-ADT-06-06-9

RÉGION NORMANDIE

Conseil Régional

Réunion du 26 juin 2023

Groupe Normandie Écologie

Amendement n°11 déposé par Laetitia Sanchez et Rudy L’Orphelin :

  1. – Augmenter les crédits Région du sous-volet 3-6 « Approches territoriales et Adaptation au changement climatique » du Contrat de plan État-Région 2021-2027 pour la Normandie de 35 000 000€
  2. – Cette augmentation entraînera un ajustement des crédits pluriannuels lors du vote du Budget primitif 2024

Exposé sommaire :

Cet amendement vise à augmenter les crédits régionaux du CPER 2021-2027 destinés spécifiquement à l’adaptation des territoires au changement climatique. 

Les conséquences et les risques liés au changement climatique doivent inciter l’État comme l’ensemble des collectivités à prendre en compte les enjeux d’adaptation dans l’ensemble de leurs stratégies et de leurs projets. Les travaux du GIEC, en particulier le deuxième volet du sixième rapport (« Climate Change 2022: Impacts, Adaptation and Vulnerability ») et ceux du GIEC normand, mentionnés dans le projet de CPER, démontrent la nécessité d’une adaptation globale, à toutes les échelles et dans tous les domaines. 

Il est également essentiel d’affecter des moyens spécifiques à des politiques et des projets d’adaptation. Engager seulement 15 M€ sur 6 ans paraît déconnecté de la réalité des conséquences actuelles et futures du changement climatique et les carences de l’État en matière de financement ne peuvent justifier un engagement aussi faible de la Région. Les prochaines années seront cruciales non seulement pour nous adapter aux impacts immédiats du changement climatique, mais aussi pour préparer les mesures d’adaptation des décennies suivantes. 

C’est pourquoi nous proposons d’augmenter les crédits destinés aux mesures d’adaptation au changement climatique. Grâce à cette augmentation, en plus de financer des études relatives aux risques liés au changement climatique, des études foncières préalables, la relocalisation d’activités, la renaturation et la restauration de friches et de parcelles agricoles, la Région s’engagera via des « contrats littoraux d’adaptation au changement climatique » avec les intercommunalités et amorcera la création d’une foncière littorale, en lien avec l’EPFN et le Conservatoire du littoral, pour créer des réserves foncières à horizon 2030, 2040, et 2050. 

AP 23-ADT-06-06-9

RÉGION NORMANDIE

Conseil Régional

Réunion du 26 juin 2023

Groupe Normandie Écologie

Amendement n°12 déposé par Laetitia Sanchez et Rudy L’Orphelin :

  1. – Supprimer les projets suivants du Contrat de plan État-Région 2021-2027 pour la Normandie : 
    1. RN13 – Déviation Sud-Ouest d’Evreux
    1. RN12 – Déviation de Mortagne-au-Perche – Tourouvre et Saint-Anne – Saint-Maurice-lèsCharencey
    1. RN31 – Études relatives au secteur de Gournay-en-Bray
  2. – Ajuster les plans de financement en conséquence 

Exposé sommaire :

Cet amendement vise à supprimer du CPER 2021-2027 les projets routiers non achevés et qui n’ont pas pour objet l’entretien, la rénovation ou la sécurisation du réseau existant.

L’effort financier nécessaire pour mettre fin à la dégradation du réseau ferroviaire et engager une véritable transition des mobilités et du transport de marchandises nécessite de dégager des marges de manœuvre budgétaires. Il est également nécessaire de cesser de subventionner le développement du transport routier, responsable d’importantes émissions de gaz à effet de serre et de la dépendance d’un grand nombre à la voiture. 

C’est pourquoi nous proposons, comme dans le cadre du moratoire sur les projets routiers que nous défendons, de réorienter les crédits ainsi dégagés vers l’entretien et le développement du réseau ferroviaire, afin d’offrir des alternatives à la voiture pour les déplacements du quotidien.