Assemblée plénière Région Normandie – Lundi 24 juin 2024 – Décarbonation de la Vallée de la Seine, Service Express Régionaux Métropolitain, Rénovation énergétique des copropriétés : derrière les bonnes intentions affichées, l’action de la Région reste marquée par le sous-investissement 

Assemblée plénière Région Normandie

Lundi 24 juin 2024

Décarbonation de la Vallée de la Seine, Service Express Régionaux Métropolitain, Rénovation énergétique des copropriétés : derrière les bonnes intentions affichées, l’action de la Région reste marquée par le sous-investissement 

Dans son discours de politique générale Laetitia Sanchez a évoqué l’actualité politique de notre pays avec les résultats des élections européennes et la dissolution surprise annoncée par le Président de la République. Si la victoire du Rassemblement National marque le retour de la peste brune en France, 80 après la victoire sur le nazisme, la carte du vote illustre également une réalité : celle de la crise de l’Aménagement du territoire qui a modelé notre pays depuis les années Pompidou. « Là où l’on voit les métropoles tertiarisées continuer à voter pour les partis de l’arc républicain, de la gauche et des écologistes au centre droit, on est frappé de voir le vote Rassemblement national s’enraciner dans les couronnes périurbaines éloignées » explique ainsi la co-présidente du groupe. Les habitants de ces territoires marqués par le déclassement et le recul des services publics font face à une forme d’humiliation sociale qui « pousse à rechercher des responsables plutôt que des solutions (…) le Rassemblement National incarne avec Jordan Bardella une nouvelle fierté identitaire. C’est la revanche des Jordan sur les Gabriel et les Emmanuel des centres-villes. » poursuitLaetita Sanchez.Face à ce constat, ont des choix courageux à faire : « Des choix qui permettront d’apporter des solutions qui améliorent le quotidien de nos concitoyens, des transports propres accessibles à tous, des aides massives à la rénovation des logements et des bâtiments, des énergies renouvelables, une agriculture saine pour nos santés et celle des sols, de l’air, de l’eau et de tous leurs habitants, nos colocaterres. Pour une politique qui répare et qui prépare l’avenir, pas qui divise et attise les peurs ».

Pour la première délibération de cette Assemblée Plénière, Rudy L’Orphelin a annoncé notre vote contre l’adoption du volet Mobilités Etat-Région 2023-2027 du contrat de plan 2021-2027. Ce volet Mobilité fait encore la part belle aux projets routiers, au détriment des réouvertures de lignes ferroviaires et au développement du fret. S’agissant du développement des alternatives à la voiture particulière et au tout camion, Rudy L’Orphelin a dénoncé le peu de crédits accordés au développement du fret : « On peut d’ores et déjà parier que le volet FRET doté de 103 millions d’euros sera notoirement insuffisant avec un montant plus de 2 fois inférieur à celui consacré aux infrastructures routières. » ainsi que le financement du SERM de Caen qui se contente de crédits d’études ayant pour principal effet de retarder encore davantage ce projet pourtant essentiel. Au sujet des trop nombreux projets routiers présent dans ce rapport l’élu du Calvados a ainsi interrogé l’action de la Région : « Pourquoi tant d’entêtement de la part de l’exécutif régional à financer de tels projets au détriment des alternatives ? » L’occasion également de rappeler au sujet des projets routiers : « De tels investissements, c’est surtout la promesse de plus de trafic, plus de pollution et in fine plus d’émissions de gaz à effet de serre. ». Rudy L’Orphelin a donc fait part de notre déception à l’égard de cette délibération qui aurait pourtant pu être l’occasion réorienter radicalement les investissements vers la mobilité durable : « Malheureusement, le volet mobilité du Contrat de Plan Etat Région ne nous invite pas, et loin s’en faut, à conclure que l’exécutif régional aurait enfin pris la mesure des immenses défis à relever pour atteindre, à l’échelle normande, la neutralité carbone en matière de transports et de déplacements. ».

S’agissant du rapport relatif au Contrat de Plan Interrégional Etat-Régions pour la Vallée de la Seine, Laetitia Sanchez a tenu à rappeler la nécessité d’accompagner la mutation écologique de ce territoire marqué par l’industrie et le transport : « la Seine et son estuaire reçoivent aujourd’hui les rejets de 30% de la population française, de 40% de l’industrie nationale et les pollutions de 25% de l’agriculture nationale. Et malgré des milliards d’investissement dans l’assainissement, on retrouve dans nos fleuves et dans la Seine des polluants éternels qui, comme leur nom l’indique, contaminent pour toujours la qualité de notre eau. ». Dans cet objectif de transition la co-présidente du groupe Normandie Ecologie a tenu à saluer la volonté affichée en faveur du repart modal du transport de la route vers le ferroviaire et le fluvial. De la même manière l’absence de tout soutien financier aux projets routiers reliant la Normandie et l’Ile de France est un signal positif pour la décarbonation de la Vallée de la Seine. Pour autant, ce CPIER illustre également un certain manque d’ambition dans la réalisation de ces objectifs. Laetitia Sanchez a ainsi regretté : « Le seul financement accordé au ferroviaire ne concerne que des études, et aucun investissement dans l’infrastructure, notamment pour le fret. » alors même que le fret ferroviaire est le mode de transport de marchandises le plus vertueux pour le climat, comme pour la desserte fine des territoires. S’agissant de la volonté affichée de transformer la vallée des hydrocarbures en vallée de l’hydrogène, Laetitia Sanchez a tenu à rappeler « les liens intriqués de ces types d’énergie – l’hydrogène étant massivement produit à partir d’énergie fossile, et servant ensuite au raffinage des produits pétroliers, au prix de millions de tonnes de CO2 émises chaque année. ». L’hydrogène est en réalité un mirage, destiné à faire gagner du temps à l’industrie fossile, ou encore à justifier une production massive d’énergie nucléaire pour alimenter des électrolyseurs.

Pour toutes ces raisons Laetitia Sanchez a annoncé notre opposition à ce rapport en concluant : « Le Contrat de Plan Interrégional Vallée de la Seine devrait être l’occasion de tracer la voie d’un réel changement de paradigme, et d’engager une réflexion globale sur les usages du fleuve, ses besoins, ses droits et ceux de ses habitant.e.s, dans une approche moins centrée sur le développement économique que sur la préservation, la qualité de vie autour de la Seine et les alternatives au modèle d’aménagement et d’exploitation qui a prévalu jusqu’à maintenant. »

L’élue de l’Eure est ensuite intervenue sur la création du dispositif « Booster IA » afin de rappeler certaines questions essentielles concernant la protection des données des utilisateurs : « Quelles garanties avons-nous que ces données ne soient pas revendues ? Peut-on être informés comme citoyen de l’utilisation qui en est faite ? Les citoyens vont-ils être rémunérés ? Pourront-ils s’opposer à la vente de leurs données ? Combien de temps seront-elles conservées ? ». Avant de conclure : « Il est de notre responsabilité de protéger nos concitoyens et de leur garantir leurs droits de de consultation ou de suppression des informations qui les concernent notamment quand elles ont été transformées. ».

La présentation de la Cartographie du Schéma Régional des Véloroutes de Normandie a été l’occasion pour Marianne Rozet de rappeler l’importance de développer les connexions entre les différents modes de transports.  En ce sens les différents projets d’itinéraire vélo prévus en lieu et place d’emprises ferroviaires actuellement non exploitées revient à opposer deux modes de transports pourtant complémentaires. C’est pourquoi Marianne Rozet a présenté un amendement visant à « garantir que les itinéraires cyclables régionaux ne soient pas réalisés sur des portions de lignes ferroviaires fermées ». Ces voies sont en effet « indispensables au futur maillage ferroviaire régional dont nous aurons besoin pour rendre l’objectif « Normandie sans ma voiture » accessible à un maximum de Normand.e.s.» a ainsi précisé l’élue de la Manche, appelant par la même occasion à « un changement de paradigme pour les mobilités des Normand.e.s ».

Toujours en matière de transport, Rudy L’Orphelin est ensuite intervenu pour rappeler notre opposition de principe à l’ouverture à la concurrence anticipée des lots ferroviaires normands « contradictoire avec les ambitions d’amélioration du maillage ferroviaire et d’amélioration de l’offre ferroviaire. ». Le rapport présenté ce lundi 24 juin en Assemblée Plénière portait sur le choix du mode de gestion pour l’ouverture à la concurrence du lot de l’étoile mancelle, un exercice plutôt convenu puisque « dès lors que vous avez fait le choix d’ouvrir à la concurrence, vous ferez systématiquement le choix de celui qui permet le transfert du risque d’exploitation sur le concessionnaire ». Si l’on ne peut encore pas se prononcer définitivement sur ce choix de mode de gestion on peut d’ores et déjà estimer que celui-ci pourrait finir par se retourner contre les normand.e.s.

S’agissant des rapports budgétaires Bastien Recher est intervenu pour annoncer notre opposition au Compte Financier Unique 2023 ainsi qu’au Budget Supplémentaire 2024. Ces deux rapports illustrent bien la politique menée par l’exécutif régional qui conduit à « un sous-investissement chronique pour les dépenses d’avenir » a regretté l’élu du Calvados. Les principales baisses de budget se retrouvant en effet dans le non-financement de la transition écologique. Bastien Recher relève par exemple : « Les dépenses pour la transition du territoire normand ne pèsent que 4% des dépenses totales de la Région. Et cela se décline à l’envie sur toutes les lignes budgétaires liées à la transition écologique. ». Les baisses de budgets présentées comme inéluctable par l’exécutif régional résultent en réalité d’un choix politique. Des marges financières existent bel et bien et c’est ce qu’a tenu à rappeler le conseiller régional : « Il faut mettre fin aux dépenses inutiles comme les subventions d’investissement pour les lycées privés (en dehors de toute obligation légale) et climaticides comme les contournements routiers ou encore le projet de Terminal croisière de la Pointe de Floride. ». Une fois ces économies réalisées la Région serait en mesure de déployer un bouclier social pour les familles normandes (gratuité des transports régionaux pour les moins de 26 ans, gratuité du volet loisir d’Atout Normandie ou encore prise en charge de la cantine pour les publics les plus fragiles.).

Cette assemblée plénière faisait la part belle à l’aménagement du territoire avec également la présentation du nouveau schéma de cohérence logistique régional. L’occasion pour Laetitia Sanchez de rappeler notre vision des questions logistiques en appelant à « changer de perspective sur les questions de logistique en travaillant sur l’existant, en rationalisant et en misant sur le report modal. ». Le contexte du ZAN rend en effet de plus en plus difficile l’acceptabilité de projets logistiques au sein des territoires, notamment quand ceux-ci concernent en grande partie l’Ile-de-France.

La thématique du logement a également été abordée au cours de cette séance avec la présentation de deux rapports. Le premier relatif à la mise en place d’une expérimentation pour la lutte contre le logement vacant en Normandie a été l’occasion pour Bastien Recher de dénoncer une délibération famélique qui consiste en un ravalement cosmétique d’un dispositif existant. « La réalité c’est qu’il s’agit ici purement d’affichage car vous ne voulez pas revoir profondément vos dispositifs qui portent sur la question du logement » a ainsi expliqué le conseiller régional. 

Le second rapport consacré au logement portait sur la modification du dispositif IDEE Action Rénovation énergétique des copropriétés visant à mettre en œuvre l’expérimentation d’une aide régionale à la rénovation énergétique des petites copropriétés (parties communes et parties privatives). Véronique Bérégovoy a alors regretté : « La Normandie contribue bien faiblement à l’objectif de rénovation de 500 000 logements par an qui serait indispensable à la tenue des objectifs de la loi de transition énergétique et de l’accord de Paris. ». En effet le dispositif présenté par l’exécutif régional vise à n’accompagner « qu’au maximum 30 petites copropriétés de 20 ilots d’ici décembre 2026 et ce à titre expérimental. » a ainsi ajouté l’élu de Seine Maritime avant de conclure : « Ce n’est pas d’expérimentation dont les habitants ont besoin, mais d’un grand plan massif de rénovation énergétique des logements »

La fin de séance faisait place à l’agriculture et, comme souvent depuis le début du mandat d’Hervé Morin, la délibération présentée concernait la filière équine avec la création du dispositif « Hippodromes de demain ». Geneviève Augé a annoncé notre abstention sur ce dispositif en raison d’un manque d’ambition dans la réponse aux enjeux liés au bien-être animal et au changement climatique.  « La maltraitance des chevaux dans le milieu hippique est un problème systémique, sans parler des morts prématurées. En France, rien qu’en 2019, 135 chevaux sont décédés en pleine course. Il y a des crises cardiaques par épuisement, mais aussi des fractures menant à des euthanasies par choix économique. Par ailleurs, 10 000 chevaux réformés partent à l’abattoir chaque année, dont de très nombreux chevaux de course. Ils sont en moyenne âgés de 13 ans, quand l’espérance de vie d’un cheval est de 20 à 30 ans. » a ainsi rappelé la conseillère régionale. Difficile donc de parler de bien-être animal en l’état mais il serait tout de même essentiel de se le donner pour horizon. S’agissant de la réponse aux enjeux climatiques, Geneviève Augé a également regretté l’absence d’indicateurs de suivis concrets en matière d’économie d’eau par exemple.

Pour terminer cette Assemblée plénière, Bénédicte Martin a pu poser une question orale, à laquelle nous allons recevoir la réponse par écrit au sujet de la fermeture du dispositif des comédiens stagiaires de la Cité-Théâtre de Caen.

La membre de la commission emploi, formation et orientation a ainsi pu rappeler l’intérêt de ce dispositif pour tout l’écosystème culturel normand : « Cette formation, unique en France, existe depuis près de 25 ans et a largement fait ses preuves (…) Bon nombre de compagnies régionales, émergentes notamment, ont été construites au sein de cette formation et bon nombre de comédiennes et comédiens sont embauchés à l’issue de cette formation par ces mêmes compagnies régionales. ».

Rudy L’Orphelin et Laetitia Sanchez

Co-Président.e.s du groupe Normandie Écologie*